dimanche 15 avril 2012

Autopsie musicale de Québec


Le marché du disque va de plus en plus mal, on le sait. Mais qu’en est-il de celui du spectacle ? Souffre-t-il lui aussi d’un déclin ? Et où se place Québec sur cet échiquier ?

 

L'entrée du Théâtre Petit Champlain

Ces questions, nous les avons posées à plusieurs personnes, dont notamment les équipes de deux salles de la Capitale Nationale, le Théâtre Petit Champlain et le Grand Théâtre de Québec. Le résultat est clair : si le marché du spectacle à Québec reste stable et connaît parfois de bons jours, l’équilibre demeure cependant toujours précaire.

L’offre ne semble pas vouloir diminuer, selon Arnaud Cordier, programmateur au Théâtre Petit Champlain : « Le public de Québec peut avoir une semaine remplie de mardi à dimanche. » Elle se multiplie même, déclare Michel Côté, programmateur au Grand Théâtre de Québec, visiblement inquiet par le gouffre qui se creuse avec la demande : « Les amateurs de spectacles seront-ils à tous les rendez-vous ? C’est toute la question. »

Établir une programmation actuelle qui suit la tendance du jour relève alors de l’exploit : les deux hommes s’entendent pour dire qu’il s’agit d’un savant mélange entre public fidèle et nouveaux spectateurs. Les programmations de chacune des salles contiennent des coups de cœur musicaux, mais aussi des incontournables, histoire de s’assurer une certaine rentabilité financière. Parmi ceux-ci, les humoristes, une première au Théâtre Petit Champlain : « C’est une grande tradition québécoise. Pourquoi alors se refuser à faire ce type de proposition ? Nous n’invitons pas n’importe qui, il y a tout de même une sélection. » déclare Arnaud Cordier. Michel Côté adhère aussi à ce propos, tout en mettant en relief la venue du futur amphithéâtre : « C’est un danger, car la tentation va être forte pour un humoriste de se produire un soir là-bas plutôt que trois ou quatre au Grand Théâtre. »
Salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec

Par ailleurs, la différence entre Québec et Montréal est marquante en ce qui concerne le marché du spectacle. Si la métropole voit de plus en plus de spectateurs rester en banlieue, la Capitale Nationale, elle, jouit selon Michel Côté d’un « très bon réseau de salles qui a tout de même ses limites ». Québec contient non seulement plus de personnes « pure laine », mais aussi une population vieillissante, un état de fait que l’employé du Grand Théâtre regrette : « On n’a pas assez de masse critique de jeunes, ce qui fait que dans les spectacles de chanson, il y a des vieux croûtons de mon âge, mais assez peu de jeunes finalement. Même en proposant des prix les plus bas possibles. »

Un joueur de plus en plus important à Québec, les festivals, pourrait bien favoriser le retour du jeune public en salle. Selon Arnaud Cordier, il s’agit là d’un atout potentiel pour les diffuseurs :
« Les spectateurs pourraient avoir envie de revoir les artistes en salles, après les avoir vus une première fois lors de ces festivals extérieurs. »

Rien n’est jamais acquis, donc, d’autant plus que ce métier, comme le souligne ce dernier, s’apparente à une « science inexacte », à un défi constant.

 
Pierre-Louis Curabet, Aude Garachon et Cyril Schreiber